mercredi 24 septembre 2008

Parlez-moi de la pluie, d'Agnès Jaoui

Éclaircie dans le cinéma français ? +

Agnès Jaoui a un talent dingue. Avec Jean-Pierre Bacri, co-scénariste elle pose toujours un doigt juste, fin et cinglant sur les déliquescences sociales française, bourgeoises, intellectuelles, et humaines.
Ici encore, c'est drôlement bien vu. Un mauvais caméraman sur le retour (Bacri), extraordinaire looser, aidé d'un jeune standardiste d'hôtel (Jamel) fait un documentaire sur une "femme qui a réussit" en la personne d'une intellectuelle parisienne féministe qui revient dans sa circonscription parachutée pour une élection. Bacri couche avec la sœur de l'intellectuelle, faible et égocentrique, et Jamel-Karim est le fils de la bonne algérienne de la famille.

La première heure est vraiment bien.

J'ai beaucoup aimé le personnage d'Agathe Villanova-Agnès Jaoui, féministe aux prises avec son mode vie, ses convictions face à deux apprentis réalisateurs très modérément compétents, qui mélangent documentaire et règlement de compte. Aux prises avec une sœur aussi dépendante de ses schémas familiaux et psychologiques qu'elle ne l'est pas. Drôlement attachante car fragile, et subissant tout le film durant l'ensemble des préjugés existant à l'encontre d'une femme indépendante qui se revendique comme féministe. C'est assez fort de réussir à raconter avec humour la dureté et la bêtise de notre société.
Même topo pour le cas Jamel, qu'on découvre acteur, jeune homme plein de rêves, enfin sorti de ses tics télévisuels, mais coincé car fils d'immigré, dans la difficulté d'être un individu à part entière quand on est le fils de la bonne. Une scène de déjeuner familial, avec la sœur, le mari, l'amant, et l'apprenti réalisateur rappelle les notables de province de Kechiche dans la Graine et le Mulet. Comme quoi Jaoui peut taper sur autre chose que les intellectuels et les bourges (ou les intellos bourges). Même si elle le fait toujours avec éclat et humour, au travers de son propre personnage par exemple.
C'est donc un film de très beaux moments, de personnages très attachants, notamment le Michel de Bacri. Un peu trop à mon goût. J'en suis ressortie avec le même arrière goût amer qu'après avoir terminé Acide Citrique d'Amélie Nothomb (un titre mensonger). Je me suis dit que tout ceci était devenu bien gentillet à la fin. Deux lesbiennes sauvées par l'amour dans un camp de concentration ça m'avait fait pâlir de niaiserie. Ici c'est moins sauvage, plus en nuance; cela ira mieux pour certains, grâce à la tendresse des leurs. Un peu trop facile, un peu trop joli. D'autant que le scénario a un problème de rythme qui fait que l'on s'égare un peu sur la deuxième moitié qui enchaîne trop vite, et ne laisse plus aux personnages le temps d'exister. Il est trop tôt temps de résoudre les intrigues, c'est dommage. Statu quo donc dans le ciel du cinéma français qui peut être bien.


mardi 23 septembre 2008

De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites, Paul Newman (1973).


Le pouvoir des fleurs ++++

De l'influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites
est un film magnifique.
Les incultes comme moi y découvrent que Paul Newman est donc, aussi, un grand réalisateur. Les très grands incultes, comme moi, y redécouvrent un cinéma américain passionnant. Un cinéma de la crise, trop humain pour être politique, trop poétique pour se targuer de réalisme.

C'est l'histoire d'une veuve qui s'occupe mal de ses deux filles dans une banlieue triste. Qui se monte la tête toute seule sur de mauvais projets mais ne fait jamais rien. La souffrance vient de la distorsion immense entre son quotidien misérable et ce qu'elle aimerait paraitre. Car elle est passée à côté de la réussite sociale et de la normalité familiale (le mari l'ayant largué avant de mourir).
Le film est construit sur cette fêlure, et sur l'incapacité de certains à cadrer dans le rêve américain au sens large. On pense parfois à un Fassbinder de banlieue américaine. De part sa violence sociale mais aussi familiale, à travers les rapports de la mère avec son aînée épileptique et pimbêche, aussi secouée du bulbe que la mère, et en quête de normalité. A travers l'abandon et la méchanceté dans laquelle la cadette est confinée, scientifique rêveuse.

Il faut dire que c'est un film remarquablement interprété. Joanne Woodward y incarne la déchéance pas digne, sur cette limite tenue entre la faiblesse et la folie, un peu Nana, un peu Virginia Woolf, elle ne se convint même plus elle même de ses propres mensonges.
Dans une société ou tout est bancale, le couple, la famille, le travail, la maison des 3 femmes, les combines de survie, seuls les rayons gamma ont de l'effet sur les marguerites qu'étudie l'adolescente. Eux seuls offrent le possibilité d'un changement.
Le reste est enrayé. Et Newman filme l'étau de la vie qui n'avance pas avec une grande humanité, inséré dans cette famille qui est la sienne dans la vraie vie.
La progression diffuse et contrecarrée de l'enfant dans ses travaux sur ses semences de fleurs exposées plus ou moins longtemps offre un éclairage curieux sur la dangerosité de l'exposition à la vie, définitivement hasardeuse.
Et comme il y a trop de finesse chez Newman pour qu'on en sorte déprimé, on en sort juste exposé.

lundi 22 septembre 2008

Mamma Mia ! de Phyllida Loid

Thank you for the music ++

"T'as passé un bon moment ou pas !".

jeudi 11 septembre 2008

Cafe de los maestros, de Miguel Kohan

La musique adoucit-elle les mœurs ? Premier documentaire SM. --

Café de los Maestros
est un superbe projet. Un Buena Vista Social Club argentin, qui veut capturer ces vieux musiciens et chanteurs, talentueux et merveilleux, pour la postérité. Adherer à ce type de projets, c'est un peu comme dire que la guerre c'est mal, ça met tout le monde d'accord. Le tango aussi, ça met tout le monde d'accord. Le tango c'est la science du frisson, le langage des sens et des sentiments, bref, c'est un sujet magnifique.

Alors j'en veux à Miguel Kohan, et j'en veux à Walter Salles d'avoir gâché un tel projet. Il faut être clair, Café de los Maestros est un film d'une faiblesse scénaristique, rythmique et esthétique qui ferait passer le projet de fin d'année de la classe de terminale B de Villebon-sur-Yvette pour Shine a Light de Scorcese.
Le film est une lutte sans merci entre des morceaux passionnants d'interviews, de séances d'enregistrements, de concerts d'un côte et de l'autre, la volonté du réalisateur de raconter une histoire qui se raconterait toute seule, celle de l'Argentine du Tango et de ses aficionados.
C'est bizarre car Kohan semble mal à l'aise avec son sujet. Chaque fois qu'une interview devient saisissante, il coupe et met des plans de ponts dans Buenos Aires, de foules anonymes, de gens qui marchent dans la rue, parfois en accéléré, parfois au ralenti. Il veut dire que le Tango est un art populaire, comme le battement de cœur d'un peuple, et c'est un échec total. Les coupure sont systématiques, et les changements de rythmes improbables, des travelling et des ralentis inutiles viennent interrompre des moments de vie, dans un studio, dans un café, et assassinent doucement et surement les trésors sur les bandes de Kohan. A force de vouloir ancrer son sujet dans la modernité, il émascule les témoins, et fait un mauvais clip.

Une nouvelle idée sur la subjectivité cinématographique. Celle d'un nouveau rapport entre le spectateur et le film, ou le spectateur se bat pour voler les visages ridés déformés par le chant, magnifiques. On se passionne pour le maestro critiquant un arrangement, et on approuve le ton et la demande comme si on faisait partie de l'orchestre. Avant d'être éjecté avec violence. Bref, Kohan créé un rapport SM avec qui voudra bien aller voir son film, pour l'amour du Tango, la curiosité musicale, ou tout autre raison. N'étant pas SM, j'ai passé un salle moment. Impression de voler des trésors, dont je ne verrai jamais que la minuscule partie émergée; impression de se faire couper, limiter et frustrer systématiquement dans son plaisir, ce qui n'est pas exactement ma vision du cinéma, ni du tango.


mercredi 10 septembre 2008

Shitz, de Hanokh Levin.

Artistes de la faim ++

Hier j'ai été voir Shitz. J'avais très peur du côté "comédie musicale" mais grâce au talent du compositeur (Philippe Miller) et à la qualité de l'interprétation, j'ai pu passer outre le traumatisme causé par Hair Spray. C'est du théâtre à mi chemin entre du cabaret Yiddish et du Genet, aussi bizarre que cela puisse paraître. Car on ne parle ici, avec un certain humour, que de la glauquitude de la nature humaine. C'est chouette.

Mise en scène : Cécile Backès

mercredi 3 septembre 2008

Star Wars : The Clone Wars, de Dave Filoni

Ce n'est que pour les enfants !!! +

The Clone Wars est un super film pour enfant. Et pour les ados attardés de la Saga, c'est bien sur toujours un plaisir et une frustration (pourquoi ne voit on pas plus Yoda ? Ou est le général Grievious ? ). Une fois qu'on a dit cela, c'est une animation réussie en terme de personnages, la technique permet un vitesse des combats qui est très plaisante. De très belles scènes de combats de rue avec le général Kenobi (toujours aussi classe dans sa version dessin animé) et le Général Skywalker (toujours aussi tête de c.. il va finir par mal tourner celui-là). Comme c'est un film pour enfant, le côté sombre (sans mauvais jeu de mots) des épisodes 1, 2 et 3 est gommé. Comme c'est un film pour enfants, d'autres thématiques assez pertinentes sont abordées, le rapport à l'autorité, l'humilité que nécessite l'apprentissage, la solidarité des Jedi et des clones (l'esprit d'équipe), la nécessité de protéger les plus faibles envers et contre tout. La terrible menace de l'empire se met quand même en place, et la tension se resserre autour d'Anakyn, décidément.

Il y a beaucoup de blagues aussi, dont certaines récurrentes (entre les droïdes), ça m'a un peu gêné sur la quantité, mais ce n'est pas éloigné du comique des épisodes 4, 5 et 6. C'est parfois bon d'être un enfant même si le tout est très bavard.
On peut ensuite se poser légitimement la question de l'épisode dans la saga. Rejeton ? Produit dérivé ? Vulgarisation ? Je dis joli film pour enfants et élégante prouesse technique. Je remarque quand même dans la salle l'effet Star Wars, à savoir des grands qui ne se connaissent pas et qui se parlent quand la lumière se rallume pour échanger commentaires et analyses, pas de doute, c'est un Star Wars.