jeudi 11 septembre 2008

Cafe de los maestros, de Miguel Kohan

La musique adoucit-elle les mœurs ? Premier documentaire SM. --

Café de los Maestros
est un superbe projet. Un Buena Vista Social Club argentin, qui veut capturer ces vieux musiciens et chanteurs, talentueux et merveilleux, pour la postérité. Adherer à ce type de projets, c'est un peu comme dire que la guerre c'est mal, ça met tout le monde d'accord. Le tango aussi, ça met tout le monde d'accord. Le tango c'est la science du frisson, le langage des sens et des sentiments, bref, c'est un sujet magnifique.

Alors j'en veux à Miguel Kohan, et j'en veux à Walter Salles d'avoir gâché un tel projet. Il faut être clair, Café de los Maestros est un film d'une faiblesse scénaristique, rythmique et esthétique qui ferait passer le projet de fin d'année de la classe de terminale B de Villebon-sur-Yvette pour Shine a Light de Scorcese.
Le film est une lutte sans merci entre des morceaux passionnants d'interviews, de séances d'enregistrements, de concerts d'un côte et de l'autre, la volonté du réalisateur de raconter une histoire qui se raconterait toute seule, celle de l'Argentine du Tango et de ses aficionados.
C'est bizarre car Kohan semble mal à l'aise avec son sujet. Chaque fois qu'une interview devient saisissante, il coupe et met des plans de ponts dans Buenos Aires, de foules anonymes, de gens qui marchent dans la rue, parfois en accéléré, parfois au ralenti. Il veut dire que le Tango est un art populaire, comme le battement de cœur d'un peuple, et c'est un échec total. Les coupure sont systématiques, et les changements de rythmes improbables, des travelling et des ralentis inutiles viennent interrompre des moments de vie, dans un studio, dans un café, et assassinent doucement et surement les trésors sur les bandes de Kohan. A force de vouloir ancrer son sujet dans la modernité, il émascule les témoins, et fait un mauvais clip.

Une nouvelle idée sur la subjectivité cinématographique. Celle d'un nouveau rapport entre le spectateur et le film, ou le spectateur se bat pour voler les visages ridés déformés par le chant, magnifiques. On se passionne pour le maestro critiquant un arrangement, et on approuve le ton et la demande comme si on faisait partie de l'orchestre. Avant d'être éjecté avec violence. Bref, Kohan créé un rapport SM avec qui voudra bien aller voir son film, pour l'amour du Tango, la curiosité musicale, ou tout autre raison. N'étant pas SM, j'ai passé un salle moment. Impression de voler des trésors, dont je ne verrai jamais que la minuscule partie émergée; impression de se faire couper, limiter et frustrer systématiquement dans son plaisir, ce qui n'est pas exactement ma vision du cinéma, ni du tango.


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