mercredi 27 août 2008

Gomorra, de Matteo Garrone

L'enfer de Dante (2) ++++

Gomorra est un film drôlement audacieux, et sans doute l'un des meilleurs films de l'année. Il confirme en tout cas un cinéma italien d'un niveau qui supporte peu de comparaisons en Europe.
C'est un film déprimant qui raconte comment le mal se répand en tâche d'huile dans une région contrôlée par la mafia napolitaine, la Camorra.
A voir ces caïds cul terreux et beaufs, on est obligé de s'interroger. A quoi cela sert il d'être mafieux ? Scarface et le parrain n'existent pas, ou seulement dans la tête de deux ados.
Garrone suit quelques personnages, liés de prêt ou de loin à la mafia. Car dans cette région filmée comme l'enfer de Dante, tout est lié à la Camorra. C'est un film ultra réaliste, avec des gens moches et pauvres, inconscients, ou la nature humaine est surexposée. 90 % des protagonistes tournent mal. C'est aussi la direction artistique de l'année. Avec des travelling qui mettent mal à l 'aise, qui donnent le vertige, dans une décharge illégale, autour d'une cité gérée par la Camorra.
Telle Gomorrhe, ici rien est à sauver, ou presque. Garrone joue tout du long à l'inadaptation des êtres vivants aux formes géométriques industrielles d'une monde perverti. Dans cette peinture naturaliste, les gens sont comme des insectes; ils ont des instincts contradictoires, des valeurs qui échappent au bon sens. Et la vie vaut très peu.
On voit beaucoup d'argent dans Gomorra, des liasses qui fluidifient le lien social dans une région abandonnée par les lois de la société. Et il devient angoissant de constater que l'ordre de la Camorra est une organisation sadique de la loi du plus fort pour le profit de quelques uns, et qu'ici, elle est un paradigme, celui qui éduque hommes, femmes et enfants.
La très grande force de Gomorra est de confronter le regard calme du narrateur, qui raconte avec une patience anthropologique, à ce monde tension et de fébrilité permanente.
Un superbe film.

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